RDC: Politique viscérale et fantasmes de balcanisation

La République Démocratique du Congo est une puissance Africaine, voire mondiale. Installée stratégiquement au cœur de l’Afrique, large de 2,345,409 de km2, La RDC est le 11e pays le plus vaste de la planète, pesant 84 millions d’habitants: seizième population mondiale!

Habité depuis trois millénaires et connu pour ses puissants empires : Lunda, Luba et Congo entre le 16e et 17e siècles, le pays est riche en culture, art et science: L’Os de l’Ishango, unité de mesure géométrique datant d’à peu près 20.000 ans, est réputé avoir été découvert a l’est de la RDC. Une grande nation donc, avec un grand peuple et une grande histoire. 

Mais l’histoire, dit-on, n’est pas linéaire. Comme plusieurs pays africains, le grand Congo souffre du fameux ‘resource curse’ – malédiction des ressources naturelles. La création d’un état congolais post-independence fut ratée suite aux troubles régionales, suivi des assassinats des pères de l’indépendance; le Katanga, conscient de ses richesses naturelles déclara dans la foulée la sécession, celle-ci fut avortée, mais dévoilant un sentiment égocentrique des régions riches, soucieuses d’exclure le reste des compatriotes du testament colonial, et garder à eux seuls les richesses se trouvant dans leurs sous-sol.

Pour un vaste territoire regroupant plus de 200 tribus, les congolais sont habités par une peur de voir un jour une partie du territoire découpé à Berlin comme propriété du roi belge Léopold II, reprise par l’un de ses neufs pays voisins, mais surtout par le Rwanda. En lieu et place de nationalisme, un sectarisme presque épidemique s’est installé progressivement depuis l’indépendance, notamment contre les personnes d’expression rwandaise. Aujourd’hui, le trafic du sentiment anti-Rwandais est monnaie courante, cher à tout populiste en panne d’idées transformatrices. 

Curieusement, ces populistes ne sont pas soucieux des peuples vivant sur les terres du Kivu, qui sont largement d’expression rwandaise car antérieur au partage de l’Afrique, mais du contenu de son sous-sol.

Un sous-sol riche, certes, mais qui n’a servi jusque-ici qu’à nourrir la polémique sur une supposé convoitise des rwandais, des ‘rwandophones’, jusqu’à s’étendre à tout politicien congolais jugé proche du Rwanda. C’est ainsi que le président Joseph Kabila fut taxé de rwandais durant les 18 années qu’il passa au pouvoir, et si les relations continuent à s’améliorer entre le Rwanda et la RDC, les origines rwandaises du président Felix Tshisekedi ne devraient pas tarder à faire surface dans les milieux des soi-disant ‘combattants’ : Une bande des sans-papiers congolais vivant des petits boulots et des services sociaux des banlieues européennes, incapable de rentrer pour bâtir leur pays.

Des sentiments nourris de l’instinct primitif hérité de la colonisation: Si on conçoit son pays comme un chantier inachevé qu’on envisage de bâtir, on a besoin de la main d’œuvre et en ce moment-là on ne vit pas dans une paranoïa de ‘l’autre’, au contraire, on encourage le plus des gens possible à venir apporter leur soutien. Mais quand on considère son pays comme un gros ‘bugali’ prêt à être bouffé, on exclut, on divise, on diabolise pour s’assurer la plus grosse part dudit ‘bugali’– d’où l’expression : ‘Politique viscérale’ (politique du ventre). 

Récemment c’était un ancien premier ministre déchu qui, pour relancer sa popularité, déclarait dans les medias que le Congo devrait faire la guerre au Rwanda et l’annexer. Le pauvre n’a pas les moyens de ses paroles, juste un fasciste qui s’ignore..

Alors que le pape François œuvre en ce moment contre la xénophobie dans le monde, un cardinal congolais appelait il y a quelques jours les autorités congolaises à ‘fermer les frontières et limiter la migration’ des Rwandais. De telles profanations venant d’un homme de l’église…

Seulement, les chasse aux sorciers n’aboutissent jamais. A force de discriminer, on finit par s’en prendre injustement aux communautés de nationalité pré-congolaise, c’est à dire, qui ont occupé leurs territoires avant la création de l’Etat Congolais et longtemps avant l’indépendance ; Une hémorragie donc, un échec à créer un Etat-Nation.

Ce qui est remarquable, c’est que pendant que les faux catholiques de Kinshasa et les sans-papiers d’Europe font du bruit, les populations avoisinantes elles, ne demandent qu’à vivre ensemble. La preuve : La frontière entre Rubavu au Rwanda et Goma en RDC est l’une des plus fréquentées au monde.

Pour se faire un nom, politistes, conspirationnistes et lumpens de tout genre crient à la ‘balkanisation’ du Congo. Déjà le terme est déplacé et tirré par les cheveux. Nous sommes bien en Afrique, pourquoi ‘balkanisation’? Pourquoi pas ‘sud-soudanisation’, ‘somalilandisation’, ‘Eritreanisation’ ou carrément ‘secessiondukatangisation’, etc. une théorie plus réaliste? Quel rapport avec les péninsules de l’Europe du Sud?

La réponse est ailleurs, les congolais craignent la perte d’une part de leur gâteau, mais n’envisage ne rien y faire. Il n’ont ni confiance en eux-mêmes, ni en des frères africains. Cette trouvaille abracadabrantesque de ‘balkanisation’, est donc un appel de détresse lancé à l’occident, à la conference de Berlin, pour protéger les natifs et le grand territoire qu’ils leur ont légué. C’est à croire qu’ils font appel à Léopold II d’outre-tombe pour venir protéger sa propriété privée.

‘Quand ça se passe ici, donc ça se passe ailleurs’, disait l’illusionniste Houdini. Les vrais bénéficiaires des fantasmes anti-rwandais, sont les mêmes colons, ceux qui ont partagé l’Afrique et ceux qui travaillent pour leur compte.

Aujourd’hui la RDC semble avoir trouvé un vrai leadership ne fait pas du populisme. Il va avoir beaucoup de travail! Dans son livre, ‘Pédagogie des Opprimés’, Paulo Freire parle du danger de l’endoctrinement et de son effet aliénateur sur les peuples, notamment à l’école, dans l’opinion publique, et surtout dans les églises. L’auteur brésilien préconise comme remède, une action éducative visant à promouvoir chez les peuples endoctrinés une conscience claire de sa situation objective, c’est-à-dire, les outiller à prendre régulièrement la mesure des enjeux culturels, politiques et sociaux du monde contemporain. Freire insiste sur la nécessité d’une pensée autonome. Un auteur Anglais du nom de Peter McLaren réussit ensuite à combiner le livre de Freire avec les écrits et citations du Che, pour en faire une suite, intitulé: ‘Che Guevara, Paulo Freire et la Pédagogie de la Révolution’ ; Ces deux ouvrages devraient faire partie des lectures obligatoires à l’école dans toute l’Afrique, mais surtout en RDC.